Clap...

Clap...

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... de fin.

Ça y est. C'est fait. Ils ont tué leur enfant indésiré. Son dernier souffle se sera porté sur sa quatrième bougie, encore fumante. Je ne sais pas encore si je suis soulagé qu'on n'ait plus à penser Social Room tous les jours ou si je suis triste de ne plus vivre ces matches dans un contexte particulier. Pas nécessairement privilégié, parce que nous avions plus l'impression de parasiter l'espace de travail des journalistes qu'autre chose, mais particulier. 

 

Je ne sais pas par où commencer pour décrire cette aventure, mais j'aimerais clarifier quelques points, car je sais que la perception de l'expérience n'est pas du tout la même vu de l'extérieur. Je vais y aller dans un ordre chronologique, ce sera plus simple. La Social Room est née en 2015, issue de ce qui ressemblait à un sujet de stage en communication. Le contrat était alors simple. Cinq twittos influents (@FeuxDeLaVilaine, @Hinho, @il_y_a_maing, @LeFootXduSRFC et @WayneRennais) seraient invités en loge, qu'ils pourraient décorer à leur guise, pour tweeter de manière décalée sur les matches. Avec un accès exclusif en avant-match aux joueurs pour se concocter des interviews décalées, aux vestiaires, etc. Le but assumé est de "donner de l'image qu'on ne peut voir ni à la télé, ni en tribune". Et rien que ces cinq twittos là, pas un de plus. Bon, ben nous, forcément, on a dit oui. Oui, "nous", car comme @il_y_a_maing s'était pété la cheville après avoir bu une bière de trop au festival interceltique, je l'ai amenée à une réu avec les gars de la com' et j'en ai profité pour me taper l'incruste. Y'a pas de raison. La réu portait sur un projet de chasse au trésor/jeu de piste géant dans Rennes, avec des joueurs, des journalistes, et tutti chianti installés à chaque checkpoint. Là on se dit que franchement c'est trop cool. Bon, spoiler alert, ce projet n'avancera jamais plus que lors de cette réunion, ce sera silence radio par la suite, mais on est chauds comme jamais. Le compte Twitter est créé, la charte graphique est mise en place par Wayne, et roule.

 

Et les matches ? Eh bah le club tient à peu près sa promesse. Un accès bord terrain, et une loge, mais "ne la décorez pas tout de suite, y'a quelques détails à régler". Il n'y aura plus jamais de loge. On est parachutés dans la tribune presse, et on s'attire les foudres de ceux qui y travaillent, malgré notre tentative de rester le plus discrets possibles. Enfin, c'est pas tout à fait vrai. On sympathise avec quasiment tous, mais le chauve qui travaille au Télégramme n'aura de cesse d'avoir un comportement exécrable durant ces quatre années, et l'ancien de FBA ne sera pas tendre non plus. Qu'importe, on a quand même un passe-droit plutôt sympa. On ne voit pas trop en quoi on donne de l'image qu'on ne peut voir ni à la télé, ni en tribune, mais c'est plutôt chouette. Alors on prend très vite une décision. La communauté rennaise est depuis 2011 une véritable référence sur Twitter, il est hors de question qu'on profite de ça à seulement six. Donc on commence à inviter des gens. Je raconte ça parce qu'on nous a reproché à terme d'inviter toujours les mêmes, mais rien que la saison dernière, en plus du coeur de la Social Room, c'est 52 personnes différentes qui ont pu squatter la tribune presse en plus de nous.

 

Les matches se succèdent, et naturellement, les premières critiques commencent à pointer le bout de leur nez. "Pourquoi eux et pas moi ?", "qu'est-ce qu'ils apportent en vérité ?", "ils se veulent décalés mais sont obligés d'être bienveillants car c'est une création du club", etc. Ça sonne un peu faux, et c'est logique. On est nous-mêmes un peu coincés dans ce jeu bizarre de devoir tenter de faire rire, sans être médisants, et le faire du stade, et de cet endroit spécifiquement, n'apporte pas vraiment de plus-value. On décide alors de diversifier l'activité en créant un site internet pour proposer du contenu. Un site développé from scratch, pour pouvoir être aussi souple que possible. Et on engage des personnes motivées pour écrire. C'est à ce moment que @Kireg_Norpe et @_MarcoGrossi rejoignent l'aventure, pour rédiger des avant-matches et après-matches décalés, de temps en temps rejoints par quelques guests comme Wayne et @LaezhDour. Kireg ne se retrouvant pas dans le bridage de ton que l'on s'impose en accord avec le club quittera l'aventure quelques semaines plus tard, et je prendrai sa succession. On développe un système de lives décalés mais qu'on abandonne après cinq-six matches. Au final, je ne suis même pas sûr que quelqu'un s'y soit un jour pointé, et ça nous faisait chier. Il faut savoir abandonner quand une idée est mauvaise. On décide de se reconcentrer sur l'essence de l'existence de notre groupe, à savoir le club et la commu. C'est alors que paraissent sur le site des reportages sur les salariés du club qui restent dans l'ombre, et surtout sur les supporters qui se sont mis à supporter Rennes alors que leurs prédispositions géographiques les emmenaient naturellement ailleurs, ou inversement ceux qui ont dû par des choix de vie partir s'expatrier. Ça plaît, et ça nous remet du baume au cœur. Les idées s'enchaînent, on interroge des twittos adverses influents avant les matches, on interview Penven, Idrac, le Roazhon's Call, le bar Aux Sports (repaire rennais à Paris). Mais on n'a toujours pas de contact avec les joueurs, et ça faisait quand même partie de la promesse initiale. On finit par avoir l'opportunité de poser des questions à Danzé. Mais il faut que ça passe par l'attachée de presse, pour validation, comme si on était un organe externe. De toute façon, tout est un peu comme ça. On veut faire gagner des maillots, y'en a soi-disant plus en stock (mensonge), on veut faire une remise de trophée officieux à un joueur, il faut aller acheter un truc à moins de vingt balles pour que les mecs fassent une note de frais. On n'a aucune interaction avec un club qui nous a lancés dans quelque chose qui n'a aucun intérêt à ses yeux en terme de com', et qui par conséquent ne débloque aucun moyen, ni aucune proposition d'amélioration. On ne peut compter que sur nous-mêmes, alors que la com' bah... c'est pas notre métier, et qu'un métier, on en a un.

 

Pour la deuxième saison, on décroche le droit de pouvoir faire gagner des places en tribune. C'est à ce moment qu'apparaissent les premiers jeux sur le site avec le Motus, et un peu plus tard des quizzes. On développe tout intégralement nous-mêmes. Et les interviews de twittos adverses se poursuivent, mais globalement la lassitude s'installe. Les membres quittent un à un la Social Room, et le club est toujours aussi distant. On apprend que Sébastien Guéguen a refusé une action proposée par PMU parce qu'"on était en partiels". En partiels bordel. Le manque de respect. C'est dans une Social Room en perte de vitesse et de motivation que @MehdiMoudrikah, @Piazzooo et @PitreCech débarquent et tentent de redonner de l'allant, notamment au compte Twitter. Le site, lui, est complètement oublié. Je le désactive même dans un rage-quit en 2017.

 

La troisième saison repart sur les mêmes bases. Le modjo n'y est plus, on ne profite même plus de nos places en tribune presse, on n'écrit plus, on ne tweete plus. On est extrêmement surpris d'être reconduits, presque un peu déçus. C'est @Marcoleptik qui assure pendant les matches alors qu'il n'est même pas encore officiellement dans le groupe. C'est en février 2018 que l'entrain revient. Je ne sais plus exactement pourquoi, mais je suis à peu près sûr que c'est dû à la ténacité d'@il_y_a_maing, dernière rescapée du groupe de cinq retenus par le Stade Rennais, qui n'a jamais ménagé ses efforts. Elle commence à tenir des fichiers Excel de statistiques sur les invitations au stade, vous devriez voir ça. Sous son impulsion, les interviews de supporters adverses reviennent, de nouveaux jeux sont développés avec Pix Room (complètement inventé par elle) et Money Drop. La Social Room fait de nouveau le plein au stade (membres et invités), et peut désormais jouir d'un écran, toujours développé en interne, diffusant les statistiques du match en temps réel, un listing des tweets contenant le hashtag #SocialRoomFC, et un classement de ceux qui tweetent le plus avec. Les idées pullulent, on se rabiboche enfin avec Sébastien Guéguen, et on s'accorde avec lui sur nos projets, qui sont entre autres d'avoir une rubrique dans le fascicule d'avant-match, et de pouvoir diffuser des tweets pendant les matches sur les écrans géants. Une réunion est planifiée pour l'été avec les mecs de la régie pour mettre ça en place. De notre côté, tout est déjà développé, ils ont juste à "se brancher dessus". On ouvre une chaîne Twitch, et on commence à planifier des FIFA contre les adversaires, bref. Tout repart de plus belle, et pour ne rien gâcher, le Stade Rennais réalise la plus belle demie-saison depuis l'ouverture du compte. On se voit même proposer une salle dans le stade pour organiser une soirée avec tous les invités et contributeurs de la Social Room. Mais évidemment, il y a un mais. Le club a changé de président durant la saison, et change également de directeur de la communication. Et à ce moment-là, tous nos projets tombent à l'eau. La nouvelle direction nous demande un bilan pendant l'été. On sacrifie une journée de vacances pour leur pondre un putain de rapport de vingt-cinq pages, qui sera passé à la broyeuse sans même être lu.

 

Peu importe, on continue d'y aller à fond pour cette quatrième saison, pour ne rien avoir à regretter. Trois nouveaux jeux voient le jour sur le site, avec Guess My Location, Anagram Line-up et Des Chiffres et des Lettres. Les interviews d'adversaires continuent, les FIFA reprennent avec un tournoi organisé pour se trouver un champion, et @_MarcoGrossi revient même pour la saison avec une nouvelle rubrique, la Troisième Mi-temps. @il_y_a_maing est inarrêtable, et ne pense à rien d'autre. C'est systématiquement la panique pour un oui ou pour un non, car elle est perpétuellement en train de réfléchir à tout. Trouver un adversaire à interviewer, retranscrire l'interview, la publier, trouver un adversaire à affronter à FIFA, lancer une session de jeu pour faire gagner des places, contacter le gagnant et lui expliquer les modalités, faire un montage avec les buts inscrits par le passé contre l'adversaire du jour, publier la troisième mi-temps, et recommencer, tous les trois jours. Un rythme infernal, et une motivation assez incroyable. À côté de ça, on publie des feuilles de route pour les matches européens, ainsi que des résumés de nos expériences lors de ces déplacements. Côté stade, c'est pas la même chose. Un jour, contre Paris, on se pointe devant la porte, et on nous dit "en fait, Franz il veut pas de vous aujourd'hui". "Bah c'est gentil, m'enfin on est là quoi, il pouvait pas prévenir avant ?". On finit par nous faire rentrer par une porte dérobée, mais le ton est donné. C'est d'ailleurs à cette occase qu'on apprend pour la broyeuse. La deuxième partie de saison sera un peu plus tranquille, mais on s'attelle à bien terminer. Bien varier les jeux, les invités, qu'un maximum de monde y trouve son compte, et qu'on ne retombe pas dans une routine qui nous a tant déprimés par le passé.

 

On arrive donc à cette saison. 2019/2020. Franz cherche à nous rencontrer, enfin. On se dit que c'est plutôt bon signe, que s'il voulait arrêter, il aurait juste coupé court. Et cette fameuse réunion a lieu le 30 septembre. Devant Aurélien, qui aura été un de nos interlocuteurs tout au long de l'aventure, Franz donc, et le nouveau CM du club, dont la raison de la présence reste cheloue, si ce n'est que ça m'a fait penser à Montanier allant chercher Courbis à la gare. D'un ton fermé, et sans aucun respect pour les litres de sueurs qui ont coulé lors de ces quatre années où nous étions livrés à nous-mêmes, Franz nous annonce que "ça marche pas, l'avenir c'est Instagram de toute façon, au pire venez pour cinq matches genre Amiens ou Metz, mais on peut pas faire plus". Ok, gros. Bah non, t'as tout faux. On ne veut pas de la pitié, on a cherché à faire du mieux qu'on pouvait pendant des années pour respecter et améliorer votre idée de départ, et tout ça sans recevoir aucune aide de votre part. Alors si tu veux plus de nous, n'essaie pas d'être hypocrite, c'est fini, et chacun fait sa vie. De toute façon, on t'oubliera, puisqu'on ne retiendra que le bon.

 

Parce qu'il y en a eu, du bon. Malgré tout, on a sympathisé avec des dizaines de personnes avec qui on ne parlait que vite fait, virtuellement. On s'est fait des potes, on s'est beaucoup marrés, on s'est revus dans le kop, aussi dans d'autres contextes, on s'est fait des bêtes de soirées, de beaux déplacements... bref, l'aventure humaine a été top. Et je ne retiendrai que ça. Je tiens vraiment à remercier tous ceux qui ont contribué à la Social Room, que ce soit en tant que membres, en tant que rédacteurs, en tant qu'invités, et en tant que followers sur les réseaux. Parce que s'il n'y avait pas eu tous ces gens, on aurait coupé court direct. Merci également aux personnes au stade qui se reconnaîtront, qui ont soutenu corps et âme la Social Room notamment après le changement de direction. Vous êtes beaux. <3

 

Ballon.

 

Ah. Je ne sais pas encore ce que je fais du site. Si certains cherchent une plateforme pour s'exprimer, venez m'en parler, il est à vous.