Mais pourquoi le Stade Rennais ? Ép. 2 : Martin (Troyes)

Mais pourquoi le Stade Rennais ? Ép. 2 : Martin (Troyes)

Partager
Suite de notre mini-série "Mais pourquoi le Stade Rennais ?". Nous recueillons les témoignages de ces supporters du Stade n'ayant aucune ascendance dans la région. Qu'est-ce qui les a poussés à se tourner vers le club de Rennes ? Pour ce deuxième épisode, c'est Martin, le Troyen, qui nous raconte son histoire.

On m’a demandé de vous dire pourquoi je supporte Rennes. Cette question, et je ne sais pas si je saurai y répondre, on me l’a posée un million de fois. Aujourd’hui à Rennes, mais aussi il y a 15 dans le fin fond du Pays d’Othe. Le Pays d’Othe, charmant petit coin au sud de la Champagne où on fait aussi du bon cidre (et oui !) et où j’ai grandi. Je suis né il y a un quart de siècle à Troyes, capitale de la Champagne (prenez ça au passage les Rémois, c’est gratuit) bien loin de Rennes et sans ascendance bretonne. Alors me direz-vous, comment en suis-je arrivé à supporter le Stade Rennais ? Pourquoi m’infliger toute cette souffrance ?

 

J’ai toujours eu un peu l’esprit de contradiction. L’Équipe de France ? Non, pas envie de la supporter. L’ESTAC (ou l’ATAC à l’époque) ? Non plus. Le club ne faisait pas rêver mais les quelques escapades en coupe d’Europe et les matchs face à Leeds ou Newcastle auraient pu me faire tomber sous le charme de l’équipe auboise. Mais le mal était déjà fait.

 

Saison 1998/1999, le Stade Rennais réalise un très bel exercice en première division en terminant 5e. À l’époque, pas de streaming, pour moi la D1, c’est le dimanche matin sur Téléfoot (merci papa et maman de ne pas m’avoir traîné à l’église). Quand t’as sept ans, tes critères sont plutôt simplistes. Le rouge et noir m’a tapé dans l’œil, c’est beau et c’est la couleur de mon club de l’époque, sympa du coup cette petite équipe du Stade Rennais (heureusement que Guingamp n’était pas en D1 à l’époque quand on y pense).

 

À la fin de la saison, mes frères et moi recevons la cassette VHS des meilleurs moments du championnat. Je peux vous dire que j’ai bien usé la bande. Le but de Pascal Feindouno qui donne le titre à Bordeaux, commenté par David Berger, je le connais par cœur. La descente de Lorient pour un petit but. Mais donc surtout ce beau parcours du Stade Rennais, les exploits de Stéphane Grégoire, Patrick Weiser et toute la bande. L’équipe qui après avoir longtemps flirté avec la deuxième division se fait le luxe de longtemps jouer au niveau du podium.

 

 

Mais le joueur qui m’a réellement fait aimer ce club, mon premier amour dans ce sport, c’est Shabani Nonda. Alors que mon frère avait Nenad Jestrovic et le FC Metz en préférences, c’est l’attaquant congolais qui finit de me séduire lors cette double confrontation contre la Juventus de Zinédine Zidane lors de l’été 1999. Pour la première fois, je vois un match complet du Stade Rennais en direct. Un grand moment, un grand souvenir, et l’équipe rennaise ne quittera alors plus mon cœur.

 

Même la Bretagne dans son ensemble devient un sujet de fantasme. Si bien que quand mon frère a la chance de partir en vacances en Bretagne au tout début des années 2000, déjà bien au courant de mon amour pour ces contrées occidentales de la France, il me ramène un beau drapeau breton qui se tient encore fièrement dans ma chambre du domicile parental.

 

Je me fais offrir mon premier maillot lors de la saison 2002/2003, Uhlsport, sponsor Finaref et floqué de mon prénom Martin, et du numéro un. Le numéro un car je joue gardien en club, si bien que grâce à ce flocage j’ai le droit de porter le maillot en match. Mes coéquipiers ne se privent pas de chambrer, on me pose des questions. Je ne suis pas le seul à ne pas supporter le club local dans cette région reculée de la Champagne, loin de là. Troyes et Auxerre sont supportés par les « vrais », mais beaucoup d’autres supportent Paris ou Marseille. Et puis il y a moi avec mon maillot du Stade Rennais à essayer de convaincre les potes que Georgi Ivanov va percer et que Ronaldinho c’est de la merde. Les années passent et l’amour ne meurt pas, bien au contraire. Si Nonda n’est plus là, Frei est arrivé et continue de me faire rêver. Et bien sûr, et surtout, Petr Cech, une idole pour un gardien comme moi. Le Stade Rennais est dans ma peau.

 

En 2009, je suis chez un pote quand on bat Grenoble pour atteindre la finale de la Coupe de France. Il ne comprend pas pourquoi j’insiste pour interrompre notre partie de Risk (que j’allais finir par perdre, comme une évidence) pour suivre le dénouement fantastique de ce match. Hors de question de manquer la finale au Stade de France. J’ai tout juste 18 ans, pas encore le permis. Et se procurer une place depuis Troyes, c’est compliqué. Je réussis à choper deux places à 100€ l’unité dans la Fnac de la cité tricasse. Ma mère, supportrice de Nantes (oui oui, peut-être une autre explication au fait que je supporte Rennes, esprit de contradiction je vous dis) accepte de m’accompagner, elle verra le sacre de la génération dorée de Montpellier contre ses protégés.

 

De mon côté, encore bien naïf à l’époque, je suis confiant pour la dernière fois avant un match du Stade Rennais. C’est sûr, c’est nous qu’on va la gagner. Et quand Carlos Bocanegra place sa tête au fond des filets, cela ne fait plus aucun doute, je prends dans mes bras ce parfait inconnu à mes côtés. On va être champions de France (sic), c’est exceptionnel. La suite vous la connaissez, je ne vous la raconte pas. J’étais encore présent au Stade de France pour les deux autres déceptions, où j’ai moins pleuré, étant davantage rodé et moins naïf.

 

Mais là encore mon amour reste intact, après avoir survécu à ça je savais que je pouvais tout encaisser. Thomert en pointe, Mandjeck dans le cœur du jeu, et même Moreira (choisissez vous-même lequel) ailier droit.

 

La Bretagne continue de m’appeler, et je viens à elle - enfin – en 2012 pour y poursuivre mes études et y déposer mes valises. Et je ne suis pas déçu. Si avec le Stade Rennais j’en ai souvent attendu trop pour être déçu au final, la Bretagne a su quant à elle me satisfaire. Je me sens aujourd’hui chez moi à Rennes. « Home is where the heart is » comme on dit. Et si mon sang n’est pas breton, il n’y pas une autre région sur terre où je veux vieillir. Tout comme il n’y a qu’un seul club que je peux supporter : le Stade Rennais.

 

Si le club se donne souvent du mal à essayer de faire en sorte que je le déteste, j’en suis bien incapable. Comme cette femme que tu idolâtres et qui peut t’insulter tant qu’elle veut, tu sais que tu en seras toujours amoureux.

 

Au final c’est toujours Jeanne Mas qui nous parle le mieux de notre Stade Rennais.

« En rouge et noir, j'exilerai ma peur

J'irai plus haut que ces montagnes de douleur

En rouge et noir, j'afficherai mon cœur

En échange d'une trêve de douceur

En rouge et noir, mes luttes mes faiblesses

Je les connais, je voudrais tellement qu'elles s'arrêtent

En rouge et noir, drapeau de mes colères

Je réclame un peu de tendresse »

 

Je ne sais pas si tout cela explique bien ma passion du Stade Rennais, moi-même j’ai parfois du mal à la comprendre et je sais que j’aurai toujours à me justifier, mais j’espère que cette modeste histoire vous aura intéressé.

 

Vive la Bretagne et Allez Rennes, putain !

 

Martin