Qu'est-ce qu'il s'est passé ? On a tout donné !

Qu'est-ce qu'il s'est passé ? On a tout donné !

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Rennes a écrit l'une des plus belles pages de son histoire jeudi dernier. 3000 supporters ont vécu quelque chose d'absolument inédit, et chacun l'a vécu à sa manière. Voici la nôtre.

Il y avait un alignement des astres. Après le succès du déplacement à Jablonec ayant donné quelques regrets aux absents, le Stade Rennais hérite du Betis, adversaire prestigieux, dans une ville de Séville où dire que l'hiver est agréable est un doux euphémisme, et tout ceci pendant les vacances scolaires de l'académie de Rennes. Cocktail d'étonnant, 2900 rennais sont présents au Benito Villamarín le jeudi, pour ce qui représente évidemment le plus gros déplacement (hors terrain neutre) de l'histoire du club. Et quelle journée ça a été ! On vous raconte notre expérience perso.

 

Tout commence la veille du match, le mercredi 20. Nous on a décidé de partir de Nantes, les tarifs étant extrêmement abordables seulement un quart d'heure après le tirage (petit coup de pression quand on réalise que deux matches auront lieu à Séville, mais les Andalous ont décidé, eux, de gérer cela intelligemment). Le vol sera paisible, bien plus que le Transavia Orly-Séville quelques heures plus tard.

 

Un peu pressés (et flemmards) on prend un taxi jusqu'au centre historique, où se trouve notre appartement, réservé lui aussi le jour du tirage. À peine arrivés, on trouve deux mecs attablés au restaurant qui jouxte notre immeuble, écharpes rouges et noires autour du cou. Discussions banales, écharpe attachée au balcon, et joie d'être dans le bain direct. On décide de les imiter après notre check-in et de manger là, affublés d'écharpes également. Et le festival commence. Le serveur nous dit cash "Oh ! Stade Rennais ! Crush them tomorrow, I hate Betis ! See you in the final ! Somos sevillistas !" C'est assez rare de trouver des locaux qui sont pour toi dans la ville où tu te déplaces, donc le sentiment est étrange, mais pas désagréable. Ça continuera jusqu'au match, beaucoup de gens viendront nous voir ponctuant leurs phrases de "suerte", "p*ta Betis"  etc.

 

On poursuit la journée en commençant à découvrir la ville, puis on se décide à ingérer des tapas en attendant @Feuxdelavilaine et @nilstalibart. Peu après que ces derniers aient commencé à manger, une mélopée désagréable se fait entendre.

Nous décidons de quitter cet endroit mal famé pour rejoindre ce qui deviendra un des fiefs des supporters rennais à Séville, le O'Neills. Toute une pièce du bar est occupée exclusivement par des Rennais qui chantent à tue-tête. Dans ce joyeux bordel, nous croisons @Clem_Gavv, puis @Fabrice. On commence à débattre sur le maillot floqué Ndiaye d'un type à la table d'en face. Est-ce un vrai ? A-t-il fait floquer son maillot Ndiaye à la boutique ? Cette dernière a-t-elle vendu plus de maillots Ndiaye que Ndiaye n'a joué de matches sous le maillot rennais ? Mystère. Toujours est-il qu'il s'agissait de @ClaudieFocan accompagné de @JozyTmx et @Jozyal avec qui nous partageons quelques pintes jusqu'à la fermeture. Fin mot de l'histoire, le maillot est un "vrai", mais uniquement porté sur le banc lors du 0-3 à la Beaujoire. En sortant, on retrouve les supporters qui s'étaient de nouveau rassemblés sur la terrasse d'un bar à chicha. Benjamin Idrac, toujours dans les bons coups, est évidemment là, smartphone à la main, pour ne rien rater du spectacle et des multiples chants en l'honneur du Stade et de... Romain Danzé. Voire même Nicolas Janvier. 

 

Le lendemain, suite de notre visite sévillane avec la splendide Plaza de España, où on retrouve d'autres têtes connues comme @JS_Dusser, @LaPetiteDame_, @NnRnlt, @CBreizh_@CubiDeCidre et @mattcharp. On aide vite fait un gars à accrocher son drapeau breton au balcon d'un monument de la place.

Puis on tombe sur un type qui nous fait vite prendre conscience de l'importance du foot dans cette ville. Son chien porte un maillot du FC Séville. Le gars me gaule en train de prendre son chien en photo et se rapproche de nous. "Suerte". Avant de s'en aller. Ça veut dire un truc comme "bonne chance" je crois.

 

Puis vient le moment de retrouver le flot. On est un peu déboussolés, car le plan initial était de retrouver le Roazhon's Call dans une crêperie bretonne qui comptait fêter son ouverture pour l'occasion, mais celle-ci a été décalée au lundi. On sait également qu'il y a une sorte de fan zone quelque part dans le coin, mais ça ne nous dit pas grand chose. On suit donc les consignes du RCK qui parle d'un rassemblement aux environs du Paseo de Catalina de Ribera. Et effectivement, il y a déjà pas mal de monde. @LaezhDour est sans surprise rond comme une queue de pelle, on retrouve également avec plaisir @MarCinRZH, @Nielsen_L, et un peu plus tard @latorfe et @ElFuoriclasse à la terrasse d'un restau à tapas.

 

On commence à faire le match. @latorfe a beau imaginer tous les scénarios possibles, ça se finit forcément mal. @il_y_a_maing, elle, ne veut pas y penser, car la deuxième mi-temps du match aller la hante à chaque fois qu'elle évoque l'idée d'un retournement. L'ambiance s'installe progressivement, les différents restaus et bars ont du mal à suivre le rythme effréné des Bretons sur la consommation de bières. Plus les Cruzcampo descendent, plus les chants montent. Sauf que traditionnellement, les Espagnols, pendant l'après-midi, tapent un petit somme. Une jeune femme, un peu excédée de voir sa sieste avortée, décide du haut de son balcon de renverser une carafe d'eau sur les supporters rennais. Erreur fatale. Il n'en fallait pas plus pour déclencher une salve de chants à pleine voix, tuant irrémédiablement tout espoir de siesta pour cet après-midi.

C'est grosso modo le moment que choisissent les huiles rennaises pour faire leur apparition au milieu d'une foule hystérique. Plusieurs "c'eeest la tournééée d'Olivieeeer ! On s'en va pas tant qu'on l'a paaaaaas !" sont lancés par les fans rennais à Olivier Létang, au moment même où @richa357, torse poil, canette de Cruzcampo achetée à une supérette du coin à la main, s'entretient avec Nathalie Appéré pour "qu'elle fasse gaffe à pas mettre du béton partout". On ne diffusera pas la photo ici par respect pour lui (elle est dispo sur la timeline de @MarCinRZH).

 

Peu après l'arrivée de @Puchkin_B qui nous salue rapidement à notre table, on tombe en rade de Cruzcampo. Devant la difficulté de s'en procurer au bar, on décide d'imiter @richa357 et d'aller s'en procurer à l'épicerie. Sur le chemin, on tombe nez à nez avec la Guardia Civil en train d'embarquer un type. L'ambiance n'est pas vraiment aussi festive de ce côté du pâté de maisons. On essaiera tout au long du séjour d'en savoir un peu plus sur cet incident  mais personne ne semble avoir compris le motif de la charge des officiers espagnols.

 

La Guardia Civil se rapproche ensuite de l'endroit où nous sommes, pour encadrer le cortège que le RCK prévoit de faire partir à 18h. Dans l'attente du départ, les chants sont toujours aussi enjoués. Il y a même des Espagnols aux balcons qui reprennent, et dansent au rythme des morceaux rennais. Mais le temps passe, et toujours pas de départ. Aux environs de 18h30, considérant qu'il y a beaucoup de route, qu'une foule n'avance pas vite, qu'il y a beaucoup de monde à faire rentrer dans le stade, et une seule porte visiteurs, on décide à contrecœur de partir à pied avant tout le monde. On vérifie régulièrement sur Twitter si le cortège est bien parti et on en a la confirmation aux alentours de 19h.

 

 

 

On arrive au stade plus de 45 minutes après être partis. Il est majestueux. Les stadiers nous fouillent trois fois, puis nous envoient les chiens. On se dit que s'ils veulent faire pareil avec les 3000 gus derrière, ils n'ont pas fini. On prend place dans la partie droite du parcage, et on attend. Le cortège arrive, vers 20h à peu près. Les supporters rentrent au compte-goutte, groupe par groupe. Je pense que tout le monde a réussi à être à l'heure au final, mais c'était juste.

La grande particularité du Benito Villamarín est cet hymne époustouflant a capella, repris par tout le stade avant le match. Eh bien je peux vous dire que c'est sacrément impressionnant. Je n'avais jamais vécu cela dans un stade.

 

Ça ne décourage évidemment pas les 3000 Rennais morts de faim qui, une fois l'hymne betico terminé, reprennent de plus belle. Jusqu'à cette fameuse 22e minute, où Ramy Bensebaini fait exulter la tribune surélevée teintée de rouge, et taire tout le reste du stade. Hunou rajoute une couche à la 30e. Rennes mène 2-0 et il ne lui manque qu'un but pour effacer les trois buts pris à l'aller. Mieux, Rennes dicte sa loi et ne permet pas au Betis de maîtriser le ballon comme il aime le faire. Mais hélas, Lo Celso, encore lui, redonne espoir aux verts en réduisant la marque, et fait apparaître le spectre du match aller. Le stade se réveille alors. Très curieuse ambiance, qui résonne énormément après les buts sévillans, ou pour l'hymne, mais qui semble assez calme en dehors de ces temps forts.

La deuxième mi-temps n'est que souffrance. Bien que les Rennais jouent plutôt bien le coup, et profitent du manque de finition de leur adversaire, le chrono fait des siennes. Tantôt il s'arrête, tantôt il recule. C'est interminable. Mais on tient toujours la qualif. Et on chante. On ne s'arrête pas. J'entends un gendarme dire à son collègue qu'il est impressionné par l'ambiance.

On va même se permettre le culot de faire des "olé" sur une belle séquence rennaise à cinq minutes de la fin. En Espagne. Contre une équipe qui a eu 75% de possession une semaine plus tôt. Puis vient cette dernière minute. Récupération de Sarr, qui peut transmettre à Ben Arfa, qui sert Niang qui délivre seul tout un peuple et célèbre d'une longue glissade vers le kop rennais. Le temps s'est arrêté, mais cette fois dans le bon sens. Juste le temps de fracturer quelques milliers de cordes vocales et de canaux lacrimaux.

 

L'atmosphère est indescriptible dans le parcage. Les cœurs battent aussi vite que le stade se vide. Seule une poignée de beticos, dans le kop, attend ses joueurs pour les remercier du parcours. Nous, on chante toujours. On est inarrêtables. Ce moment ne finira jamais. Comme ça avait été fait à Jablonec, le parcage entame des "Beeetis ! Beeetis !" qui seront très appréciés côté opposé, et par les joueurs andalous partis au décrassage, qui applaudissent au passage la meute rouge et noire. Les minutes se font longues, les supporters scandent des "les joueurs avec nous !" pour forcer le destin. Et ça ne tarde pas après ça. Niang se dirige vers le virage sonore et nous fait un remake de sa glissade sous un vibrant "olé", suivi par Hunou, puis Grenier qui avait pris soin au préalable d'enlever ses claquettes pour éviter une blessure un peu con. Niang, le héros de la soirée, joue ensuite au capo en lançant de tout en bas un "qui ne saute pas n'est pas rennais", évidemment repris par les 3000 âmes. Puis quelques clappings, parce qu'on n'en a jamais assez. Chaque clap résonne de manière impressionnante dans tout Séville à travers la brèche du virage opposé.

Les acteurs terminent par une espèce de tentative de gavotte improvisée. Ça ne ressemble à rien mais c'est cool. Ils finissent par rentrer, dont un Grenier à reculons qui aurait volontiers passé l'intégralité de la soirée sur la pelouse du Villamarín. Après quelques nouveaux olés quand il galère à remettre ses claquettes, le public commence à se mouvoir vers la sortie. En chantant à tue-tête un air qui restera pendant des jours entiers dans la tête de tous : "olélé, olala, qu'est-ce qu'il s'est passé ? On est qualifiés !"

 

Le chemin du retour est plus léger, tout le monde est sur son nuage, refait le match. Arrivés dans le centre de Séville, on voit quelques supporters rennais se faire prendre en photo avec des sevillistas, ravis comme jamais. En deux jours, voir leur équipe se qualifier et leur ennemi se faire éliminer est pour eux un bonheur immense. On décide ensuite de ne pas prolonger une journée qui a été longue et riche en émotions. On apprendra le lendemain qu'on est loin d'être un cas isolé, et ça ne nous surprend pas plus que ça.

 

Le lendemain justement, après avoir reçu les félicitations de plusieurs aficionados sévillans, on décide de rejoindre Nils dans le quartier de Triana, plus betico que sevillista. À peine la calle Betis entamée, un serveur nous voit arriver de loin et nous félicite. "Vous avez une très belle équipe. Et Sarr, votre attaquant sénégalais, quelle vélocité ! C'est mérité, nous, on n'avait qu'à avoir un tueur devant". Bam. La leçon de fair-play. Bon, soyons honnêtes, certains avaient quand même un peu le seum.

 

14h30, direction l'Alcazar. Juste après l'entrée, un homme nous demande le résultat. On lui répond qu'on a gagné, et il nous confie qu'il n'osait pas demander ce matin, malgré les hordes rouges qu'il a croisées.

Un peu plus tôt, au restaurant, après qu'on ait fini de mater le tirage au sort, un couple nous avait également demandé le résultat, puis qui Rennes allait jouer ensuite. J'ai eu le malheur de répondre "Arsenal, ce sera moins facile", ce qui m'a valu de me faire toiser par le restaurateur qui aiguisait deux couteaux : "Facile ? Hmm". Oups.

Après avoir visité le quartier de Santa Cruz, et acheté les journaux, on décide de retourner se poser dans un bar. À chaque fois qu'un petit groupe de rennais passe et nous voit, il entonne un "qu'est-ce qu'il s'est passé ?" auquel on répond plus fort "on est qualifiés", ce qui par effet boule de neige arrive jusque dans les bars d'à côté et se propage. 

 

La soirée se termine dans un petit restau, où un serveur nous sort, dans le plus grand des naturels : "Arsenal ? Avec votre équipe ? C'est jouable". Pincez-moi. Je rêve depuis le début.

@BallonSurLaN12 / @il_y_a_maing

 

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